Obligatoire sur les véhicules diesels neufs commercialisés depuis le 1er février, le filtre à particules est un véritable progrès en matière de pollution. Toutefois, son fonctionnement engendre de nombreux problèmes et des coûts d'entretien prohibitifs. Le mieux serait-il l'ennemi du bien ?
Dans les années 1990, les fumées noires émises par les moteurs diesels soulevèrent un véritable tollé. En tant que spécialiste reconnu, PSA décide de redorer le blason de ce type de motorisation en développant un filtre à particules (FAP) alors que son nouveau HDi est déjà en phase de commercialisation.
Peugeot commercialise le premier FAP de série
Il s’agit alors d’un vrai défi puisque ce FAP est mis au point dans un laps de temps record de 18 mois. Si Mercedes avait effectué des essais au milieu
des années 1970, PSA est le premier à en équiper un véhicule de série en mai 2000, en l’occurrence la Peugeot 607 2.2 HDi. Ce système permet d’éradiquer le point faible du moteur diesel : le rejet de suies.
Filtre à oxydation contre FAP breveté PSA
Ces particules, composées de carbone, d’hydrocarbures imbrûlés…, se forment lors du refroidissement des gaz au niveau de l’échappement. Le FAP les filtre, les stocke et les brûle lors du processus de régénération. Pris au dépourvu, les autres constructeurs se sont lancés dans la bataille en
choisissant une autre technologie, le filtre à oxydation, afin de contourner les brevets PSA.
Le FAP : une technologie inappropriée en ville
Comme toute nouvelle technologie, la généralisation du filtre à particules s’est accompagnée de problèmes techniques. Avec le recul, on observe qu’il est efficace sur des véhicules qui parcourent de longs trajets à haut régime.
Pour les autres, cela pose un gros problème. En effet, un diesel fonctionne
la plupart du temps à bas régime, ce qui exclut une montée en température suffisante pour nettoyer le filtre. Or son bon fonctionnement réclame tout l’inverse. Par conséquent, s’ensuivent des pannes à répétition (voyants allumés, manque de puissance, colmatage du filtre, casse du moteur ou
du turbo…), autant d’ennuis qui entraînent des coûts de réparation très élevés. Ce qui laisse à penser que, naturellement, un moteur diesel
avec un FAP n’est pas en adéquation avec une utilisation urbaine du véhicule.
Achat d'un diesel : peu de conseils aux clients
Reste que les conducteurs exaspérés pointent du doigt les constructeurs, considérant que les défaillances du FAP sont liées à des vices cachés de conception. Dans les faits, c’est surtout le manque de pédagogie et de conseils des réseaux vis-à-vis de leurs clients qui est en cause. Pourquoi un vendeur conseille-t-il une version diesel à une conductrice qui ne roule qu’en ville, si ce n’est que pour une question de marge ? Car même si les constructeurs spécifient noir sur blanc le fonctionnement d’un FAP, combien l’expliquent-ils avant et lors de l’achat de la voiture ?
Les avaries liées à cette technologie sont donc peut-être avant tout dues à une désinformation des automobilistes. Sauf que le choix d’un diesel ne se résume pas désormais au prix à la pompe, mais à au type d’utilisation.
Le FAP en huit questions
1 - Comment ça marche
Le FAP fonctionne sur un principe de stockage/déstockage des particules dans le filtre, tout en laissant passer les gaz d’échappement. Il n’élimine pas les particules en continu car la température des gaz n’atteint pas les 550 °C requis en permanence, excepté lors d’un parcours autoroutier.
En ville, à une vitesse de 50 km/h, la température n’excède pas 150 °C. Le moment idéal pour régénérer est défini en fonction de la perte de charge (différence de pression entre l’entrée et la sortie du filtre), mais aussi des conditions d’accumulation des suies, du nombre de kilomètres parcourus, de la vitesse moyenne et du type de roulage. Il ne faut pas attendre que le filtre soit trop plein pour effectuer une régénération, car dans ce cas, elle risque d’endommager le FAP.
2- Quelles sont les différentes technologies ?
Les deux systèmes présents sur le marché utilisent la postinjection dans la chambre de combustion pour réchauffer les gaz puis l’effet thermique
du précatalyseur. Toute la différence se situe au niveau de la régénération du filtre.
A — Pour le FAP de PSA, c’est l’additif contenu dans un réservoir indépendant qui représente l’innovation principale. En effet, ce mélange d’oxyde de fer et d’oxyde de cérium, baptisé Eolys, a un effet
catalytique en se mélangeant aux suies. Il libère de l’oxygène au coeur de chaque particule, ce qui accélère la combustion en abaissant la température de brûlage des particules de 100 °C, soit 450 °C. La régénération ne dure ainsi pas plus de cinq minutes et limite la surconsommation de carburant. Inconvénient, il faut faire le plein d’Eolys tous les 120 000 km et sa durée de vie était limitée à ses débuts.
B — Sur le filtre à oxydation, ce n’est pas un additif qui facilite le brûlage des particules mais les parois internes recouvertes de métaux précieux (platine…) et qui ont un effet catalyseur sur les suies accumulées. Mais il induit des températures très élevées (environ 650 °C) pour enclencher la régénération, ce qui reste le point faible de ce système dans le cadre d’une utilisation urbaine. De plus, la régénération est plus longue (de 15 à 20 minutes), d’où une forte surconsommation. De plus, cette régénération est sensible aux conditions de roulage et risque d’être incomplète, ce qui encrasse et endommage le filtre. Pour régler les problèmes des régénérations en ville, Renault et Toyota ont ajouté un cinquième injecteur intégré à la ligne d’échappement. Lorsqu’une quantité de suie suffisante est détectée dans le FAP, du carburant est injecté dans les gaz d’échappement provoquant une élévation de leur température (au-delà de 570 °C). Le filtre placé juste derrière utilise cette chaleur pour améliorer le processus de destruction des particules stockées. Avantage : le processus de régénération ne dépend plus de la vitesse, du régime moteur ou de la durée du parcours. Il fonctionne même quand le moteur est au ralenti en ville et dans les embouteillages. Uniquement monté sur le 1.5 dCi (en raison d’une affaire de brevets avec Toyota), ce système n’est plus en vigueur sur la version Euro V, Renault misant sur le posttraitement de son nouveau système d’injection.
3- Qu’est-ce qu’une régénération ?
Elle s’apparente au ramonage d’une cheminée, qui doit être nettoyée régulièrement afin d’éviter le colmatage. Il existe trois types de régénération :
A — La spontanée. C’est le scénario idéal lorsque les conditions de conduite influencent directement la température des gaz d’échappement et par conséquent les particules qui brûlent naturellement dans le filtre. Toutefois, les seuils établis pour activer le nettoyage sont difficiles à atteindre dans des conditions de conduite normales.
B — La commandée. Elle est pilotée par le calculateur moteur dont le but est d’augmenter la température des gaz d’échappement par divers moyens : coupure du recyclage des gaz (EGR), pilotage du turbo pour maintenir le couple moteur et activation de la post-injection.
C — La forcée. Elle n’est appliquée que par les ateliers des réseaux à partir d’un outil de diagnostic qui mesure le pourcentage de colmatage. Outre le nettoyage du filtre, l’huile moteur et le filtre à huile sont remplacés et le calculateur moteur est remis à zéro. Il faut savoir que les constructeurs prennent la première régénération en garantie, les suivantes étant à la charge du client. À titre d’exemple, pour un Renault Scénic II 1.5 ou 1.9 dCi, l’opération est facturée entre 220 et 250 €.
4 - Faut-il le remplacer et à quelle fréquence ?
C’est le gros avantage des FAP non additivés : leur durée de vie théorique correspond à celle du véhicule. Néanmoins, la longévité dépend de plusieurs facteurs : style de conduite (route ou ville…), fréquence des régénérations, qualité de l’entretien… qui provoquent le colmatage et un remplacement prématuré. Chez Audi, par exemple, un contrôle est préconisé entre 150 000 et 210 000 km selon la motorisation. Le résultat
revient souvent à conseiller le remplacement. Quant au FAP avec additif, tout dépend de l’année du véhicule. En effet, plusieurs générations de FAP se sont succédé chez PSA. Jusqu’en novembre 2002, la durée de vie ne dépassait pas 80 000 km. Cette limite atteinte, une seconde génération
d’additif (Eolys 176) permet de repousser l’échéance à 120 000 km. En 2003, PSA lance un FAP avec une structure en nid-d’abeilles capable de stocker une plus grande quantité de particules. Aujourd’hui, le remplacement s’échelonne entre 140 000 et 210 000 km selon la motorisation.
5- Est-il sans entretien ?
Pour le FAP à oxydation, aucune intervention n’est préconisée, si ce n’est un contrôle. Néanmoins, le fonctionnement de ce type de filtre génère un phénomène de dilution de l’huile, c’est-à-dire que le surplus de gazole imbrûlé se mélange au lubrifiant lors de la phase de post-injection. La qualité de l’huile peut alors se dégrader rapidement, d’où la réduction des intervalles de révision. Le calculateur moteur analyse l’huile et dès que
le seuil est dépassé, le voyant d’huile agit comme un garde-fou. De ce fait, l’utilisation d’une huile spécifique est obligatoire. Quant au FAP additivé, l’entretien consiste à effectuer un complément d’Eolys tous les 120 000 km.
6 -Quelles sont les principales avaries ?
La plus courante est l’allumage du voyant et le passage en mode dégradé du moteur (baisse des performances) liés au colmatage du filtre.
La solution passe par une régénération forcée en atelier, voire par le remplacement. Mais ce n’est pas tout. La dilution de l’huile et la dégradation de sa qualité entraînent une mauvaise lubrification du turbo avec des risques d’endommagement. Par ailleurs, l’augmentation du niveau d’huile peut être la cause de l’emballement du moteur et engendrer une casse pure et simple.
Toutefois, les avaries du filtre dépendent aussi d’autres causes :
dysfonctionnement du thermostat, du débitmètre, des injecteurs, présence
d’huile dans le circuit d’admission, problèmes de turbo ou de la vanne EGR… Un véritable casse-tête pour les réparateurs.